
Il est des matins où les cloches semblent résonner autrement. Ce lundi de Pentecôte, sous la lumière douce d’un soleil estival, Moissac s’est éveillée au rythme lent d’une tradition qui traverse les générations : la messe des marins, célébrée à l’abbatiale Saint-Pierre.
Ce lundi n’était pas un simple jour de célébration : il venait clore un week-end entier dédié aux fêtes de la Pentecôte, débutées dès le samedi. Trois jours de rassemblements, de préparatifs, de partages — trois jours où la ville s’est mobilisée pour faire vivre ses traditions, jusqu’à cette matinée lumineuse où la messe des marins a pris des allures de point d’orgue. Une dernière note, à la fois solennelle et joyeuse, portée par l’effort de tous.
Une marche dans les rues et dans les cœurs
Dès les premières heures, la ville a vu défiler la procession des marins. Porté par les accents enjoués de la banda La Pieuvre, le cortège s’est élancé depuis la rue de la Régie, pour rejoindre l’abbatiale par la rue Sainte-Catherine. La ville regarde passer un peu de son histoire.
Dans cette marche, il y avait les marins, bien sûr, accompagnant leur bateau avec fierté. Mais aussi les élus, le maire, la députée Marine Hamelet, les conseillers municipaux, la Rosière. Et autour d’eux, des habitants venus nombreux, certains curieux, d’autres fidèles à ce rendez-vous du cœur.



Une messe pour ceux qui voguent… et ceux qui manquent
À l’intérieur de l’abbatiale, la lumière filtre doucement sur les pierres anciennes. Le père Pierre Hoan célèbre la messe. Les lectures ont été assurées par les marins eux-mêmes, tissant un lien direct entre la parole sacrée et la vie des hommes de l’eau. La banda et la chorale jouent quelques notes, chantent. C’est simple, c’est juste.
Le prêtre prend la parole. Il parle de marche, de direction, de sens : « Lorsque nous commençons la procession, nous savons quelle est notre destination. Cela donne du sens à nos pas, comme dans la vie. Cette marche vers l’abbatiale est le reflet de notre existence : chacun avec son âge, son histoire, mais unis par une même quête. » Un chemin, une destination, à l’image de nos existences, multiples mais convergentes. Ce n’est pas un discours, c’est une pensée partagée à voix douce.























Un repas, une chanson et des voix qui s’unissent
Après l’office, les marins se retrouvent autour d’un repas. Les rires s’installent vite. Puis vient la surprise : Xavier Coron (chanteur et musicien du groupe Cadill’Rock), père d’un des marins, leur offre une chanson. Il chante pour eux, pour les marins. Et bientôt, tout le monde reprend le refrain. C’est spontané, joyeux, vivant. Rien de solennel, juste des gens qui chantent ensemble, une communauté réunie.
Sur l’eau, les gestes du souvenir
L’après-midi, la fête continue. Le cortège repart, cette fois en sens inverse. La relique de saint Cyprien quitte l’abbatiale et rejoint le canal. Le public suit le mouvement. Ils embarquent. La relique a suivi le cours paisible de l’eau. Le canal, puis le Tarn.
Le soleil tapait fort, mais la ferveur ne faiblissait pas. Sur les rives, les regards suivaient lentement le passage des bateaux. Vient la bénédiction des eaux. Une prière pour les marins disparus. Une gerbe jetée à l’eau. Peu de mots, mais beaucoup de regards.
Une tradition vivante, portée par tous
Au-delà des moments partagés, la fête repose aussi sur celles et ceux qui, dans l’ombre, la rendent possible. Mickaël Lanöé a tenu à remercier les marins, la municipalité, la paroisse, la députée, ainsi que les boulangers de la ville, qui préparent le pain dès l’aube le dimanche matin. Il a salué l’aide précieuse de l’entreprise Furlaneto, fidèle soutien pour la coupe du mai chaque année : « Sans eux, il serait difficile de sortir le chêne », a-t-il confié. Il a également souligné l’implication des parents de marins, et surtout, celle de la jeunesse : « Nos rangs se sont rajeunis, c’est une promesse d’avenir. La relève est en marche. »
Le maire Romain Lopez, lui aussi, a rendu hommage à l’engagement des marins tout au long du week-end, « véritables chevilles ouvrières qui font vivre cette tradition ». Une collaboration essentielle entre la ville et les marins, cimentée par le respect et la fidélité à ce rendez-vous.
Et puis, la lumière
Le soir venu, la musique a repris ses droits. On danse un peu, on attend. À 22h30, les premiers éclats fusent. Le feu d’artifice éclaire les berges. Et l’iconique pont Napoléon s’embrase. Moissac s’illumine. « Il y avait bien des années que je n’étais pas venu admirer le feu d’artifice. Lorsque j’ai appris qu’une surprise concernait le pont Napoléon, cela m’a replongé dans les souvenirs des feux d’antan. J’ai voulu revivre cela, » confie un moissagais.
Un retour chargé d’émotion, d’autant que cela faisait plus de trente ans que le pont Napoléon n’avait plus été ainsi célébré.
La journée s’achève. Entre terre et eau, silence et musique, recueillement et fête, elle a tissé des liens. Des gestes anciens, des visages d’aujourd’hui, et une mémoire partagée, en toute simplicité. Moissac a, une fois encore, célébré ses marins avec une émotion tranquille et une beauté partagée.
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