C’est une promesse tenue sous un ciel clair. Une promesse faite à une grand-mère, et portée jusque sur l’esplanade de l’Uvarium, au cœur d’un samedi de Pentecôte comme on les aime à Moissac : chaleureux, vibrant, ancré.
Il est 17h. Devant la mairie, un cortège s’ébranle. En tête, les marins, silhouettes familières de la fête. Ils ouvrent la marche, fidèles au poste, « qu’il fasse canicule ou qu’il tombe des cordes », comme le dira plus tard Stéphanie Gayet. Derrière eux, les majorettes de Majo’ Danse de Caussade, la banda Pina Colada, puis la calèche. À son bord, la jeune Cassandra Viguié, robe blanche et sourire aux lèvres. À ses côtés, le maire Romain Lopez, sa marraine, et le rosier, André Larrégola, né en 1937, doyen, agriculteur, arboriculteur et chasselatier, témoin vivant d’un monde qui continue de transmettre.
Cassandra, visage d’une jeunesse moissagaise engagée
L’air est doux, le soleil généreux. L’Uvarium s’est rempli tôt, comme chaque année. Les enfants courent entre les bancs, les anciens saluent, on attend, on regarde, on se reconnaît. Et puis vient le moment : la jeune rosière monte les marches de l’Uvarium accompagnée du maire.
Élue le 28 mai à seulement 19 ans, Cassandra Viguié incarne une jeunesse discrète, mais déterminée. L’aînée de quatre enfants, engagée en service civique à l’école Firmin Bouisset, elle rêve de devenir préparatrice en pharmacie.
Des traditions qui se déclinent depuis trois siècles
Le maire prend la parole. Il rappelle le sens profond de cette tradition. « La rosière, c’est notre reine de Pentecôte. Ce que nous célébrons ici, c’est la vertu, la fidélité, la mémoire… et le plaisir simple de se retrouver, toutes générations confondues. » Il sourit en regardant l’assistance : « Que ça fait plaisir de voir toutes ces générations réunies aujourd’hui, avec toutes ces couleurs, et ce beau soleil, pour honorer notre 123e rosière. » Il salue « ces traditions qui se déclinent sur trois siècles » et cette popularité qui ne fait plus de doute, grâce à celles et ceux qui « reviennent chaque année pour la faire vivre ».
Vient le temps du couronnement. Sa marraine lui remet une couronne tressée de trois fleurs des champs, choisies avec soin : « La violette, symbole de la vertu simple et solitaire ; la rose blanche des haies, symbole de l’innocence ; le bleuet, symbole de la fidélité et de l’espérance. » Trois fleurs modestes, pour une charge qui ne l’est pas.
« Mamie, je t’avais fait une promesse, je l’ai tenue » — Cassandra Viguié
« Je suis très fière d’être là aujourd’hui. Je m’engage à respecter la tradition de la rosière tout au long de l’année. Mamie, je t’avais fait une promesse, je l’ai tenue », dit-elle, la voix tremblante. Ce n’est pas grand-chose et c’est tout à la fois. C’est l’intime qui devient public, l’histoire d’une jeune fille qui, le temps d’un instant, porte les valeurs d’un territoire et le rêve de sa grand-mère.
Sa marraine, elle, l’encourage : « Je te souhaite de profiter de ce week-end. Tu es la reine de Pentecôte et je te souhaite une agréable année faite d’évènements et de rencontres enrichissantes et j’espère que cette expérience t’enrichira personnellement. » Et d’ajouter, dans un sourire : « Je salue les petits marins, toujours présents… Ce sont eux, la relève. »
Comme le veut la tradition, le bouquet de la rosière – pampres de vigne et épis de blé – est offert au rosier. Ce geste, presque invisible, porte un sens profond : celui de la transmission.
Le maire l’a rappelé en clôture : « Cette réunion des générations, ici et dans la foule, c’est aussi le symbole de la transmission, du respect de la terre et de nos anciens, du legs de nos traditions qui ont façonné l’identité de notre commune. Alors si cette tradition perdure, c’est parce que beaucoup de moissagais se sont succédé et ont fait en sorte qu’elle vive. »
« J’étais stressée… »
Interrogée après la cérémonie, Cassandra confie que tout est allé très vite depuis son élection. « Une semaine très rapide avec peu de temps pour se préparer. J’étais stressée, mais très bien entourée. Aujourd’hui, j’ai ressenti beaucoup de joie. Et de l’émotion, vraiment. » Demain, la journée débutera tôt. À 8h, elle reprendra le fil de ses engagements.
Autour d’elle, la foule s’attarde, prend des photos. On commente l’élégance de la calèche, la clarté des discours, la douceur de l’air. Mais plus encore, c’est ce que cette fête raconte qui semble rester : un sentiment d’appartenance, une histoire tissée de liens, d’attentions et de gestes transmis.
Le soir, la musique prendra le relais avec l’orchestre Les Années Stars, offert par le comité des fêtes. Et jusqu’à tard dans la nuit, Moissac fêtera sa rosière, sa mémoire, et ce lien indéfectible qui relie les visages d’aujourd’hui aux gestes d’hier.
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