Il y avait du vent, du bruit et cette odeur de pelouse humide qui annonce les grandes après-midis de rugby au stade Jo-Carabignac. Les tribunes, pleines comme un dimanche de derby, vibraient avant même le coup d’envoi. L’Avenir Moissagais recevait Lévézou Ségala, un adversaire solide, accrocheur, venu d’Aveyron partageant la troisième place du classement. Autant dire qu’on attendait un test grandeur nature. Verdict : Moissac a frappé fort. Score final : 26 à 9. Et surtout, une impression grandissante que ce groupe a définitivement laissé derrière lui son costume de promu.
Une première mi-temps compliquée
« Une première mi-temps un peu compliquée », résume sans détour Benoît Mothes, le manager moissagais. Le ton est posé, lucide. Oui, Moissac a dominé, mais sans concrétiser. Trop de fautes, trop de ballons tombés, et un réalisme aveyronnais qui ne pardonne pas : à la pause, le tableau affichait 0–9.
« On leur donne vraiment neuf points, c’est un cadeau », grince encore le coach. Le public, lui, retenait son souffle. Jo-Carabignac, d’ordinaire si bruyant, semblait figé. Les Chasselatiers s’épuisaient à faire tourner le ballon sans franchir la ligne. On sentait de la frustration, une impatience palpable. Le vent contraire n’aidait pas.
Le réveil moissagais : intensité, maîtrise et cœur
Et puis, il y a eu la pause. Les mots ont dû claquer dans le vestiaire. « On s’est remis les idées en place », raconte le deuxième ligne Geoffrey Cousin. « Les coachs ont fait un bon discours, on a gardé le ballon, on ne les a plus tombés… et le banc a fait une énorme rentrée. »
Dès la reprise, le ton change. Moissac reprend la main sur le ballon, accélère, s’installe dans le camp adverse. Dumail et Lopez, impeccables au pied, ramènent les leurs à hauteur. Puis vient l’essai du capitaine Kévin Bargibaux, à la 53ᵉ minute, transformé par Lopez : le stade explose. Les Aveyronnais, jusqu’ici si rigoureux, commencent à subir.
L’Avenir Moissagais déroule enfin son jeu, celui qu’on aime : conquête propre, passes tendues, soutien permanent. À la 69ᵉ, Joan Mira file dans l’en-but pour le deuxième essai. Lopez transforme, 26-9, rideau. L’affaire est pliée.
« Aujourd’hui, ils ont fait plaisir, ils ont fait le taf », salue Benoît Mothes. « On est capables du tout comme du pire, mais ce dimanche, ils ont prouvé qu’ils avaient du caractère. » Le co-entraineur Cédric Pannebiau, complète : « Les consignes étaient simples : tenir le ballon, être patient. Le second essai est bien construit. On aurait aimé le bonus offensif, mais ne faisons pas les difficiles. »
Un groupe qui vit bien, très bien même
Dans les vestiaires, après la rencontre, les sourires en disent long. Ce groupe moissagais respire la cohésion. « On est sur la dynamique de l’an dernier », confie Geoffrey Cousin. « Tout le monde s’éclate, les deux équipes vivent très bien ensemble. » L’alchimie est réelle. Et le banc, une fois encore, a pesé lourd : la profondeur du groupe, souvent citée comme un atout, a fait la différence.
Jo-Carabignac, citadelle imprenable
À domicile, Moissac reste invaincu. Pas un seul adversaire n’a réussi à s’imposer au stade Jo-Carabignac cette saison. Un détail qui n’en est pas un. Car cette enceinte devient peu à peu une forteresse où souffle un vent particulier — celui du collectif, de la confiance retrouvée.
Les tribunes l’ont bien senti : cette équipe, promue il y a quelques mois encore, joue désormais comme une habituée du haut de tableau. Troisième place confirmée, peut-être même consolidée selon les résultats des autres rencontres. Mais le staff refuse de s’enflammer. « Le classement, bien sûr que c’est important, mais ce n’est pas la priorité, » insiste le manager. « Ce qu’on veut avant tout, c’est que les gars prennent du plaisir. »
Cap sur Figeac, sans pression mais avec ambition
Le week-end prochain, c’est un nouveau déplacement périlleux : Figeac, une grosse écurie de la poule. L’occasion pour les Moissagais de tester encore un peu plus leur solidité. « On ira sans pression, mais pas en touristes », prévient le manager. « On va bien bosser cette semaine et on sera prêts. »
Sur la pelouse, les crampons s’enfoncent dans la terre humide, les supporters se dispersent lentement, encore souriants. Moissac a frappé fort, oui. Mais plus encore, Moissac a grandi. Dans la manière, dans l’état d’esprit, dans cette sérénité nouvelle qui fait les équipes qui comptent.
À Moissac, ce dimanche, le rugby a retrouvé ses saveurs d’automne : du combat, du cœur, et cette certitude que la saison ne fait que commencer — mais que l’Avenir, lui, est déjà bien en marche.
Score final : Avenir Moissagais 26 – 9 Lévézou Ségala
Essais : Bargibaux (53ᵉ), Mira (69ᵉ)
Transformations : Lopez (2)
Pénalités : Dumail (2), Lopez (1)
Cartons : un jaune et un blanc côté moissagais
