À Moissac, une colocation pas comme les autres

collocation inclusive Moissac
Gaël, Pierre et Monique dans le jardin de leur colocation à Moissac : une vie partagée qui mêle autonomie, entraide et convivialité.
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Un parfum de gâteau, des rires timides, quelques larmes contenues. Au cœur de Moissac, c’est une garden-party un peu particulière qui a rassemblé élus, parents, bénévoles et voisins curieux. Pierre et Gaël, deux jeunes adultes en situation de handicap, recevaient chez eux pour inaugurer leur colocation grâce à l’association Espérance Bleue 82.

« Ce sont les garçons qui ont tout organisé, les courses, la préparation… ça fait une semaine qu’ils en parlent », glisse Anne Rouleau, présidente de l’association. Et en effet, on sent l’excitation dans chaque détail : nappes, boissons fraîches, petits mots de bienvenue. Rien n’a été laissé au hasard.

Deux garçons, un projet, une maison

Depuis huit mois, Pierre (34 ans) et Gaël (28 ans) vivent ensemble, accompagnés par une équipe d’auxiliaires de vie. Leur quotidien est rythmé par des pictogrammes, des menus préparés le vendredi, des sorties ou encore des randonnées comme celle de huit kilomètres à Boudou, un moment de dépassement et d’émotion. Cindy, l’une de leurs auxiliaires, raconte : « Ce sont eux qui font. On propose, on cadre, mais tout passe par leur choix. » Une autonomie progressive, patiemment construite, et qui redonne confiance. « L’important, c’est qu’ils se sentent bien. Pas les mettre en échec. »

L’arrivée de Monique, 80 ans, un tournant

Mais la grande nouveauté, c’est l’arrivée annoncée d’une troisième colocataire : Monique, 80 ans, retraitée seule, mais pas isolée. Avec un sourire, elle raconte : « Je savais que l’association cherchait quelqu’un. J’ai dit à Anne : j’aimerais bien rentrer avec les garçons. » Pour elle, la colocation est autant une solution économique qu’un choix de vie : « J’aurai ma chambre, mais aussi la possibilité de partager des activités. »

Un pari intergénérationnel audacieux, qui séduit déjà les deux garçons : « On est contents, ça fait du bien d’accueillir quelqu’un », confie Pierre, visiblement fier.

Une garden-party pleine d’émotions

Devant les invités, Pierre prend la parole, déterminé. « C’est agréable de se sentir soutenu. On a des AVS formidables. Parfois, c’est dur, mais on essaie. Et moi, j’adore Moissac. Ça fait dix ans que j’y vis, je voulais un projet ici. L’inclusion, ce ne sont pas que des mots, ce sont des actes. »

À ses côtés, Gaël reste plus discret, submergé par l’émotion. Pierre le soutient, presque comme un grand frère, et reprend : « Cette ville, je l’adore. On a travaillé, on espère que ça vous plaira. »

Les élus présents ne cachent pas leur admiration. Le maire, Romain Lopez, félicite « un projet exemplaire d’inclusion » et promet l’appui de la commune. La députée Marine Hamelet, habituée à croiser Pierre depuis des années, souligne « sa persévérance incroyable pour trouver une solution d’autonomie ». Quant à David Gasquet, vice-président de l’association, il rappelle que cette troisième colocataire est « une force pour les deux garçons, mais aussi une condition de viabilité pour l’ensemble du projet ».

Entre fête et symbole

La fête avait aussi ses surprises : Pierre a remis un tableau à Annie, gagnante d’une tombola organisée à Castelsarrasin lors de l’inauguration du terrain de la prochaine collocation, avant que son camarade Bastien n’offre un deuxième prix à Marie. Des gestes simples, mais lourds de sens : une manière de dire merci, et surtout de montrer que les garçons ne sont plus seulement bénéficiaires d’un projet… mais aussi acteurs de la vie associative.

Et au détour d’un mot, Pierre résume peut-être le mieux cette journée : « Le monde irait mieux si on faisait confiance aux jeunes en situation de handicap. »

Le quotidien d’une autonomie en construction

Il faut aussi dire les choses sans les enjoliver : organiser cette inauguration a été épuisant. Les auxiliaires veillent, cadrent, encouragent. « Ça demande beaucoup d’énergie, mais ouvre de belles perspectives », souffle Cindy. Chaque sortie, chaque tâche ménagère, chaque menu de la semaine est un pas de plus vers l’autonomie.

Le chemin reste long, mais Pierre le répète comme un mantra : « Ce qui ne tue pas rend plus fort. » Dans cette petite maison du centre-ville, deux jeunes hommes tracent leur route, épaulés par des familles, des élus, des professionnels… et bientôt par Monique, une octogénaire qui croit autant qu’eux à la vie partagée.

Pierre, Gaël… et la vie qui continue

À la fin de la journée, la fatigue se lit sur les visages. Mais aussi la fierté. Comme le dit Pierre, « voir les sourires des jeunes dans les rues de Moissac lorsque je sors me fait chaud au cœur. » Une façon simple de rappeler que l’inclusion, ce sont parfois ces petits instants de vie partagée qui font toute la différence. Une nouvelle page s’écrit à Moissac : celle d’une colocation où l’inclusion n’est plus une promesse, mais une réalité vécue au quotidien.

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