Ils s’appellent Adam ou Sara. Ils ont seize ou dix-sept ans. Vendredi 6 juin à Montauban, ils étaient trente-huit à être distingués pour trois années d’un engagement exigeant : celui des jeunes sapeurs-pompiers. Sous les ors sobres de la préfecture du Tarn-et-Garonne, ils ont reçu le Prix du comportement citoyen — symbole d’un engagement devenu rare : celui de consacrer ses week-ends à apprendre à secourir, protéger, servir.
C’est un moment solennel, mais sans raideur. Les visages sont concentrés. Les uniformes impeccables. La fierté est palpable, mais contenue, à la manière de ceux qui savent ce que veut dire « tenir son rang ». La cérémonie, initialement reportée en raison d’une visite ministérielle, prend ici tout son sens. Comme l’a souligné Erick Lebrun, président de l’ANMONM82 : « Cette remise de prix, même différée, ne fait que renforcer l’importance de notre engagement collectif à honorer ces jeunes et leur parcours exceptionnel. »
Une école du courage et du lien
Depuis onze ans, l’ANMONM82 remet ce prix aux jeunes sapeurs-pompiers à l’issue de leur formation. Ce n’est pas une récompense technique, mais une reconnaissance du comportement exemplaire : assiduité, rigueur, esprit d’équipe. Pour ceux qui forment ces adolescents, comme Élisabeth Lafitte, animatrice JSP à Nègrepelisse, l’enjeu dépasse largement les manœuvres ou les cours : « Former des jeunes, c’est bien plus que leur apprendre des gestes de secours ou des techniques de lutte contre le feu. C’est leur transmettre des valeurs : la solidarité, le sens de l’effort, le respect, le dépassement de soi. »
Son témoignage frappe par sa sincérité. Elle y parle de timidité, de transformation, d’élans partagés. Et de cette magie discrète qui opère au fil des mois : « Ils arrivent parfois timides, en manque de confiance, puis petit à petit, ils se transforment. Ils gagnent en maturité, en autonomie, en fierté aussi. » Et surtout, ils comprennent que l’engagement n’est pas une course. « Ce n’est pas une compétition, mais une coopération. »
Trois années pour trouver sa voie
Pour Adam, du pôle de Beaumont-de-Lomagne, l’entrée dans le dispositif ne fut pas une décision personnelle. « Ce sont trois années d’engagement. Devenir JSP n’était pas mon choix, mais celui de ma mère. C’est elle qui m’a poussé. » Mais ce choix imposé s’est mué, chemin faisant, en révélation :
« Derrière chaque exercice, il y a du sens. Ce qui était un engagement guidé est devenu une passion. » Il remercie ses formateurs : « Ils nous ont transmis la culture, le savoir-être, plus qu’une formation. C’est une étape qui demande de la rigueur, de la persévérance. Je n’oublierai jamais. »
« Notre engagement ne fait que commencer. »
Certains vont poursuivre leur parcours, comme Sara, du pôle de Verdun-sur-Garonne, qui rejoindra à la rentrée la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris. « Bien au-delà des gestes, nous avons découvert un métier et nous avons appris à travailler en équipe. Nous avons formé une incroyable famille. Les liens tissés resteront bien au-delà. » Elle conclut, sobrement, comme on jure fidélité sans formuler de serment : « Notre engagement ne fait que commencer. »
Le prix d’un engagement
Le Prix du Comportement Citoyen, remis par l’ANMONM82, ne distingue pas seulement les résultats, mais l’attitude. Le sens de l’effort. Le respect de l’autre. « Vous incarnez les valeurs que beaucoup invoquent, mais peu pratiquent, » a salué Erick Lebrun dans son discours.
Autour de lui, les familles écoutent avec une fierté discrète. Ce sont elles, aussi, qu’il remercie. « Chaque samedi, ce sont des mères, des pères, qui accompagnent, encouragent, soutiennent. Sans eux, rien de tout cela ne serait possible. »
Une jeunesse qui donne l’exemple
Vincent Roberti, préfet du Tarn-et-Garonne, présent pour remettre les prix, a salué ces jeunes avec une forme de gratitude assumée : « Voir et entendre les témoignages de ces jeunes est une excellente illustration de l’espoir de notre société. »
Dans une société qui doute parfois de sa jeunesse, ces profils-là rassurent. Ils rappellent que le sens de l’engagement se transmet, mais se mérite : « Tous les élèves qui se sont engagés dans la voie de la formation de jeune sapeur-pompier doivent être félicités et considérer qu’ils sortent grandis de cette expérience. » Et d’ajouter : « Ce prix du comportement citoyen est la reconnaissance de vos efforts, mais aussi un encouragement à continuer dans cette voie. Le chemin que vous avez choisi n’est pas le plus facile, mais c’est celui qui mène à une vie pleine de sens et d’accomplissement. »
L’engagement, au présent
Il ne s’agit pas d’un aboutissement, mais d’une étape. Une première marche vers le volontariat, ou vers une carrière dans les secours. Mais surtout, vers une conscience collective rare pour leur âge. Comme le disait Élisabeth Lafitte : « Former les jeunes sapeurs-pompiers, c’est investir dans l’avenir. C’est leur offrir une chance de devenir des femmes et des hommes engagés, utiles, solidaires. »
Et peut-être aussi, s’offrir à soi-même, adulte, le cadeau de garder l’enthousiasme intact : « Grâce à eux, je garde l’engouement, la fraîcheur, l’envie des premiers jours. C’est le plus beau cadeau. »
Alors que le monde bruisse d’individualisme et de repli, ces jeunes-là font un pas de côté. Ils choisissent l’effort, l’exigence, l’écoute. Et donnent à voir, dans leur humilité même, une France vivante.
« On ne peut être citoyen tout seul,» a rappelé le Préfet. C’est peut-être cela que cette génération nous offre de plus précieux : le goût du collectif. Et la force de croire que, même en 2025, s’engager pour les autres n’a rien perdu de sa noblesse.
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