À Caylus, le 31ᵉ régiment du génie en pleine immersion : trois jours « dans la verte »

31e régiment du génie  rallye militaire à Caylus_JDJ
Un sapeur scrute l’horizon fusil en main, un autre relaie une information cruciale, tandis qu’un troisième maîtrise un prisonnier au sol. Une scène intense qui résume trois jours d’immersion du 31e régiment du génie. Crédit photos JDJ
natura-baies.com

Lundi matin, Caylus, 8h00. L’air est coupant, le sol encore humide de la pluie de la nuit. Sur le camp, pas une silhouette. Le silence est tel qu’on en vient à se demander si l’exercice annoncé n’a pas déjà commencé ailleurs. Puis, soudain, la forêt s’anime. Ils étaient 29, invisibles quelques secondes plus tôt, parfaitement camouflés. En une fraction de seconde, les rôles se distribuent : assaut, appui, couverture. Une mécanique huilée, précise. Le spectacle ne dure que quelques instants, mais il dit tout : le rallye du 31ᵉ régiment du génie de Castelsarrasin est lancé.

Trois jours « dans la verte »

Cet exercice marque l’aboutissement d’une semaine d’instruction. Trois jours entiers d’évaluation, de restitution de compétences « dans la verte », comme disent les officiers. Comprenez : en pleine nature, en conditions de rusticité maximale. Le capitaine Tommy, qui dirige l’exercice, résume d’une phrase l’esprit de l’opération : « Ce matin, leur mission est simple : s’emparer d’un objectif. » Mais derrière la formule simple se cache une mécanique complexe : discrétion, repérage, synchronisation.

Une restitution des savoir-faire militaires fondamentaux

La veille déjà, les soldats avaient goûté à la dureté de l’exercice : une course d’orientation de nuit, un bivouac sous la pluie, puis départ de mission avant l’aube. « L’objectif, c’est de tester et de travailler là où ça pêche », ajoute l’officier. Le tout après une semaine d’instruction dense : combat, NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique), transmissions, secours au combat… Une remise à niveau générale, suivie d’une évaluation de 72 heures : ateliers, missions de jour et de nuit, mise en fatigue progressive. « Une belle manière de commencer l’année », sourit l’officier. Car derrière l’image d’un régiment hyper-spécialisé, ce rallye a une vertu essentielle : rappeler que, quelles que soient leurs compétences techniques, les sapeurs du 31ᵉ restent avant tout des soldats.

Du renseignement au combat rapproché

Dans ce jeu d’ombre et de feu, rien n’est laissé au hasard. Une fois l’objectif pris, tout commence à peine : exploitation des informations, prise en charge d’un prisonnier, soins… et surtout le fameux compte-rendu, pilier de la culture militaire française. Car une info brute n’est qu’un bruit. Pour devenir un renseignement, il faut la vérifier, la rendre fiable et discriminante.

C’est là qu’intervient le lieutenant Louisa, responsable de l’instruction en renseignement. Sa mission : apprendre aux soldats à reconnaître et classifier le matériel ennemi, à établir un compte-rendu utile.

« On ne fait pas du naming, explique-t-elle avec un sourire. Le but n’est pas de mettre une étiquette, mais de donner au chef l’information la plus discriminante possible. Une bonne information, transmise au bon moment, peut décider de tout. » Avec elle, des planches d’identification défilent : drones, chars, hélicoptères d’attaque ou de transport des différents pays. « Tous les ans, on recycle les savoir-faire de base. Ce sont des compétences qu’on ne doit jamais perdre de vue, même avec une spécialité technique très poussée. C’est un grand écart permanent : rester soldat, tout en étant technicien. »

Une mosaïque de 35 métiers pour un même uniforme

Le 31ᵉ régiment du génie, c’est une mosaïque de savoir-faire : plus de 35 métiers différents. Mais l’instruction ramène chacun à l’essentiel.

Le colonel Caire, chef de corps récemment arrivé, insiste sur ce point : « Le rallye est une remise à niveau collective. On peut être technicien pointu, mais il faut aussi garder les fondamentaux : se déplacer, observer, utiliser son arme, rendre compte. » Pour lui, l’exercice est à la fois un entraînement et un symbole. « C’est une manière de rappeler que la technicité ne fait pas oublier la rusticité. Derrière chaque métier, il y a un soldat. »

Le rallye, passage clé pour les jeunes recrues

Dans les rangs, on trouve des sapeurs chevronnés, mais aussi des nouvelles recrues. Pour elles, le rallye est une immersion grandeur nature, un moment charnière.

Ces jeunes découvrent l’armée dans toute sa rudesse : dormir dehors, évoluer en silence, encaisser le froid. Et surtout, comprendre que chaque geste compte. Le rallye ne pardonne pas l’improvisation : un repérage raté, une mauvaise transmission, et c’est toute la manœuvre qui s’écroule.

Au poste de commandement, le colonel Caire observe. Pour lui, ce rallye est une première : « C’est un exercice régimentaire, mais aussi une prise en main. Il faut connaître ses gens, ses équipes, en dehors de la caserne. »

Un chef au plus près de ses hommes : « Partager le même gîte, les mêmes températures. »

Il le répète : il ne s’agit pas seulement de contrôler, mais de vivre avec ses hommes. « Je partage le même gîte, les mêmes couverts, les mêmes températures, » confie-t-il.

Ce choix n’est pas anodin. Pour le chef de corps, ce rallye est aussi un temps d’intégration. « Les nouvelles recrues, c’est la respiration de l’armée de Terre. Il faut les embarquer dans un train qui va très vite, mais en progressivité et avec bienveillance : d’abord la confiance, puis l’exécution, et enfin l’évaluation. »

Et derrière cette pédagogie, il y a aussi une stratégie : détecter les talents, les pousser, faire de ce régiment un ascenseur social. « La jeunesse est la prunelle de nos yeux. On cultive ici une ossature de commandement, un équilibre subtil entre bienveillance et exigence. » Une phrase qui claque comme un rappel : l’armée n’est pas qu’un terrain d’exercice, c’est aussi une école de vie.

Le drone, nouvel acteur du champ de bataille

Difficile d’ignorer l’évolution des techniques. À Caylus, entre deux assauts classiques, on entend soudain le bourdonnement d’un drone. « Aujourd’hui, on vole autant qu’on tire », résume le colonel. Il insiste : « Le drone devient une arme comme les autres. Il faut apprendre à l’intégrer dans la manœuvre, à le considérer comme une pièce du système de combat. »

Ce virage technologique est assumé, mais il ne doit pas masquer l’essentiel. « Ces bases, poursuit le colonel, on les apprend en trois mois. Mais elles s’oublient vite. Or, sur le terrain, elles peuvent sauver des vies. »

Fatigue, rusticité et esprit d’équipe comme moteurs

Le format de 72 heures impose fatigue et rusticité. « L’idée, explique un capitaine, c’est de rester alerte et lucide, pour monter en rusticité. » Mais ce rallye n’est pas qu’un test, c’est aussi un défi collectif. « Les hommes se donnent, il faut les valoriser », insiste le colonel. À l’issue de l’exercice, une section est donc mise à l’honneur : GRIS 10, celle du lieutenant Louis-Marc et de ses sapeurs de la 973ᵉ CADO, qui décroche la première place.

Un séminaire de commandement tourné vers l’autonomie

Le rallye s’achève, mais pour le colonel, l’histoire ne fait que commencer : « Je suis très content de ce que j’ai vu. Nous allons pouvoir monter les curseurs. » Un séminaire de commandement suit l’exercice, avec une idée directrice : « commander par l’intention, pas par la modalité ». Comprendre : le but prime sur le chemin. « On recherche l’esprit d’initiative. L’autonomie, la responsabilité, ce sont les vraies prérogatives d’un chef. » Mais tout en gardant l’équilibre : ni trop de laxisme, ni trop de rigidité.

Le message est clair : derrière l’évaluation, il y a une ambition. Faire du 31e régiment du génie non seulement une unité technique, mais une école de commandement.

Un régiment au service du Tarn-et-Garonne

Trois jours d’exercice, des centaines de gestes répétés, une cohésion forgée à la sueur et au froid : au-delà de la performance, le rallye du 31e régiment du génie incarne une vérité immuable. Dans un monde dans lequel la technologie transforme le champ de bataille, c’est encore l’humain qui demeure au centre de tout. À Caylus, les sapeurs ont rappelé que la force d’un régiment ne se mesure pas seulement à ses moyens, mais à la solidarité, à l’endurance et à la fierté d’appartenir à une même armée, celle du courage et du devoir.

Pour ne rien manquer de nos prochaines publications, n’hésitez pas à vous abonner à notre page Facebook.

📩 Pour recevoir les articles par E-mail Inscrivez-vous

Article précédentFiançailles officielles entre l’Armée et des entreprises du département
Article suivantCastelsarrasin. Et si, pour une soirée, on dansait ?
Emilie BOTTIN
Rédactrice passionnée bénéficiant d’une expérience en tant que correspondante de presse pour un journal régional bi-hebdomadaire, j'ai développé un amour profond pour la narration locale. Ma mission est de diffuser une information juste, factuelle et sans distorsion. Je crois au pouvoir de la vérité pour renforcer les liens communautaires et inspirer la compréhension. J'aime rencontrer des gens et partager leurs histoires uniques. Chaque individu a une voix précieuse, et je m'efforce de la faire entendre à travers mes articles. Rejoindre le Journal du Jour me permet de continuer à servir ma communauté en offrant un accès gratuit à une information locale de qualité. J'ai hâte de contribuer à un média qui valorise l'engagement et la transparence.